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 T'enflamme pas, je veux dormir. (nell)

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U. Charles Lester
U. Charles Lester
→ MESSAGES : 226
→ ICI DEPUIS : 29/12/2013


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MessageSujet: T'enflamme pas, je veux dormir. (nell)   T'enflamme pas, je veux dormir. (nell) EmptyLun 30 Déc - 20:34

Le soir était tombé depuis un moment déjà, et le lendemain, j'avais une journée chargée. Pour autant, à nul moment, je n'envisageai de rentrer tôt. J'avais décidé de passer toute la soirée dehors, dans le parc, à l'ombre d'un arbre, là où nul ne pouvait me voir. Il faisait vraiment fait, et j'avais dû m'emmitoufler très chaudement - je n'étais toujours pas habitué au climat de l'Alaska, même si celui de l'Écosse n'était pas des plus chauds non plus - afin de profiter du coucher de soleil, en solitaire comme à l'accoutumée. J'aimais bien ce spectacle depuis que j'étais ici. Je n'avais jamais vraiment pris le temps de me rendre compte de la beauté de mon lieu de vie jusque là, parce que j'étais trop occupé à me morfondre et à déprimer. Si je n'avais pas changé radicalement, comme je l'espérais, si ma vie était toujours ce même couloir vide où j'avançai sans comprendre comment inviter d'autres personnes à me rejoindre, je n'étais plus non plus tout à fait le même. A présent, il y avait autre chose que moi qui m'intéressait, et c'était la nature, parce qu'elle me rappelait la liberté. Combien de fois avais-je maudit ce don qui m'avait forcé à quitter un foyer où j'étais choyé et gâté comme pas possible, juste parce que ma mère avait plusieurs zéro sur son compte en banque ? Tout cela, pour atterrir dans cet endroit glacé, où je n'étais pas à l'abri de la dépression, et encore moins du travail. Je soupirai. Si encore je maîtrisai assez mon don pour pouvoir le contrôler à ma guise, et m'enfermer dans des moments pareils, où la solitude ne me pesait plus, mais où je me sentais au contraire pleinement maître de ma destinée... Évidemment, j'étais bien loin de ce niveau. Ma maîtrise de mon talent n'avait pas vraiment augmenté depuis que j'étais venu en Alaska - peut-être bien parce que je ne fournissais pas assez d'efforts, cependant, il m'était difficile de vouloir me soumettre à tout ce qu'on demandait de moi. Le soleil finit par disparaître de l'horizon, je compris tout à coup que j'étais seul, et je restai un long moment les yeux fermés, essayant vainement de me remémorer ce qu'on avait bien pu m'apprendre récemment. Malheureusement, je ne parvenais pas à fixer mes pensées ; elles virevoltaient dans les airs, et j'aurais aussi bien pu essayer d'attraper des mouches à mains nues. Excédé par cet échec qui survenait dans un de mes rares moments plein de volonté, je jetai un coup d'œil à ma montre. L'heure me convainquit de rentrer au plus vite ; j'étais resté bien plus longtemps que je ne le pensais. Je me levai donc, époussetai rapidement mon jean avant de rentrer, en prenant bien soin que personne ne me vît. Je n'aurais pas apprécié que quelqu'un fît la moindre remarque sur mes horaires, car en ce qui me concernait, ils me convenaient parfaitement. Jamais je n'accepterai de respecter un couvre-feu.

Je traînai un peu dans les couloirs en me demandant combien de mes « camarades » - en grande majorité des gosses qui avaient bien l'âge de rester sur les bancs de l'école, eux... - étaient endormis, et combien avaient décidé de faire la fête avec leurs voisins. Rien qu'à cette pensée, je sentis mon cœur se serrer. Pourquoi moi, je n'avais jamais réussi à me faire des amis ? D'accord, je voulais bien reconnaître que mon caractère n'était pas facile, cependant, il fallait reconnaître que je le valais bien... Je n'aurais jamais pu me défaire de mon attitude de gosse de riche, et c'était peut-être ce qui dérangeait les gens, au fond. Mais ils ne comprenaient pas. Ils n'avaient pas conscience de cette barrière invisible qui m'entourait, et dont j'étais le seul à être conscient. Pour eux, c'était naturel de parler avec les autres, d'échanger sur des sujets divers et variés, et au final, de bien s'entendre. Avec moi, ça ne marchait pas. J'étais incapable de comprendre comment fonctionnait une relation sociale, et ce simple fait brisait tous les autres atouts que je pouvais avoir. Plus que mon arrogance, tel était le nœud du problème : je ne savais pas du tout comment être normal. Quand je devais parler avec quelqu'un, je cherchais mes mots, je ne trouvais pas le moyen d'ouvrir une véritable conversation et, au final, je ne parlais que de moi. Non que ce fût un sujet qui me déplaisait, j'aurais pu en discuter pendant des heures. Mais bien sûr, cela ne suffisait pas à construire une amitié. On n'a pas besoin d'en savoir beaucoup sur l'autre pour l'apprécier, évidemment, mais quand vous lui donnez l'impression que vous n'en avez rien à faire de lui - impression qui était souvent véridique en ce qui me concernait, mais passons - vous n'arrivez à rien. Je rêvais de trouver la recette magique qui me permettrait de m'intégrer aux autres. Bien sûr, je n'admettais pas ouvertement que j'en rêvais. Cela aurait paru trop... pathétique. Je n'aurais jamais permis à quiconque d'entrevoir ma faiblesse, tout comme je ne me serais jamais permis de verser une seule larme si j'avais été triste. Je devais supporter le fardeau de la solitude en silence, assumer avec toute la force dont j'étais capable. Après tout, c'était à cela que l'on reconnaissait un Lester. Même dans les pires situations, il ne se laissait pas aller, il trouvait le moyen d'affronter le problème qui se posait à lui. Cela dit, je n'étais pas sûr d'avoir assez tiré du côté Lester pour y arriver. J'avais tout de même été élevé par ma mère...

J'arrivai devant ma chambre, pensant que j'allais pouvoir me mettre tout de suite au lit afin de cesser de ruminer de sombres pensées. Même si je n'avais pas envie de dormir et que je n'avais pas besoin de beaucoup de sommeil, il me paraissait plus sage de cesser d'être éveillé. C'était trop... dangereux. Mais mes plans allaient être contrariés par une petite silhouette fluette qui attendait devant ma porte, visiblement patientant en espérant que j'allais finir par revenir. Je le reconnaissais. C'était le petit pyromane. Je n'étais pas vraiment surpris de le voir. Il avait une curieuse tendance à suivre ma trace quand l'envie lui en prenait, depuis que je lui étais venu en aide pour maîtriser un incendie qui avait - encore - échappé à son contrôle. Il était vraiment étrange, mais j'évitais de faire trop de commentaires. Déjà, parce que je ne voyais pas ce que j'aurais pu lui dire. Bien sûr que j'aurais aimé avoir une parole gentille pour lui, mais j'en étais incapable. Trop égocentrique, trop asocial pour cela. Je m'étais toujours contenté du silence face à lui, tout comme lui qui n'avait pas vraiment ouvert la bouche en ma présence, et je lui lançai donc un simple « bonsoir » en passant devant lui, enfonçant ma clé dans la serrure. Pourquoi avais-je envie de lui parler ? Peut-être parce que j'avais l'impression que j'aurais plus de chance de ne pas me refouler avec quelqu'un qui était encore moins doué avec les autres que moi. Et puis, je devais admettre que le petit m'intriguait. Il avait si frêle, si fragile... j'avais l'impression qu'un mot mal placé aurait pu le briser comme une brindille. Il était sans doute plus résistant que cela - quand on est enfermé dans sa timidité, il faut de la force pour supporter de voir les autres s'épanouir loin de soi. Je ne savais rien de lui, mais je devinais déjà bien des choses rien qu'en le regardant. Si jeune. Si inexpérimenté. N'importe qui aurait pu lui poser le grappin dessus, en faire ce qu'il voulait, abuser de lui. Curieusement, cela me dérangeait. Je ne me souciais pas de grand-monde à part moi, mais j'avais envie de garder un œil sur lui. C'était un camarade du silence, après tout. J'ouvris la porte et lui fis signe. Je ne lui indiquai pas qu'il pouvait entrer avec des mots, mais je savais qu'il comprenait parfaitement que je le laissais entrer s'il en avait envie. Sans plus me soucier de lui, je pénétrai dans ma propre chambre, allumai la lumière, balançai mes chaussures dans un coin - je n'avais jamais eu beaucoup soin de mes affaires, quand elles étaient cassées, on me les remplaçait, point - et commençai à fouiller dans mon armoire pour en extirper mon pyjama. Mes intentions étaient très claires, j'avais l'intention de dormir. Cependant, si mon invité avait envie de me taper la causette... oui, je sais, c'était de mauvais goût. Il ne disait rien, et je n'avais pas le courage d'engager la conversation. Je refermai mon armoire, plus par habitude que par réelle défiance - je ne le voyais pas vraiment avoir envie de me voler quelque chose, il paraissait trop renfermé pour avoir ce genre d'initiative. Maintenant, tout ce que je comptais faire, c'était de trouver le moyen de me changer sans qu'il me vît. Oui, j'avais de la pudeur, et je pense que lui non plus n'aurait pas apprécié. Je lui fis donc signe que j'allais me changer dans la salle d'eau, toujours en silence, et m'y enfermai, le temps d'enfiler mon doux vêtement de nuit.

Je terminai de plier mes vêtements quand je sentis tout à coup une odeur familière. Beaucoup trop familière. Tout à coup en proie à une panique effroyable, je sortis de la salle d'eau, me précipitai dans ma chambre et contemplai le désastre. C'était bien ce que je pensais. Il se contrôlait aussi bien que moi, c'est-à-dire pas du tout, et son don avait décidé de refaire surface juste quand j'avais le dos tourné. Dans ma chambre. Sur mes affaires. Je poussai un cri en voyant que mes affaires étaient en train de brûler. « Putain, mais t'as fait quoi ?! » : m'exclamai-je, plus par impulsion que par réelle colère contre lui. Je ne pouvais pas dire si je lui en voulais ou pas, mais la priorité, c'était d'éteindre le feu. Facile, je n'avais qu'à faire comme la dernière fois : me concentrer, utiliser mon don pour empêcher le feu de se propager et aller tranquillement chercher de quoi l'éteindre. L'extincteur ne devait pas être très loin. J'essayai donc de faire le vide en moi et de saisir ce talent qui allait me permettre de sauver mes précieuses affaires - enfin, précieuses, elles n'étaient pas irremplaçables non plus, j'avais assez d'argent pour cela. Pourtant, alors que le garçon me regardait, je ne parvins pas à prendre mon don en main. Trop de stress. Se pourrait-il qu'en réalité, le fait que ce fût mes affaires m'affectait plus que je voulais bien l'admettre ? Comme si cela ne suffisait pas, l'alarme incendie commença à résonner, et je n'ignorai pas qu'un petit voyant allait s'allumer au dessus de ma chambre, pour indiquer que c'était de là que le feu s'était déclenché. Mais je n'allais certainement pas partir alors que mes affaires brûlaient. « J'y arrive pas, finis-je par crier au garçon. Va vite me chercher l'extincteur si tu tiens à la vie ! » Ce n'était pas mon intention de le brusquer ou de me montrer méchant avec lui, mais... là, il y avait quand même mon lit qui était en train de cramer ! Or moi, j'avais bien l'intention de dormir cette nuit. Je fis un dernier effort pour essayer d'utiliser mon don, mais mon angoisse et la sonnerie stridente avaient raison de toute ma concentration. Je n'y arriverai pas tout seul.
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A. Nell de Lacroix
A. Nell de Lacroix
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MessageSujet: Re: T'enflamme pas, je veux dormir. (nell)   T'enflamme pas, je veux dormir. (nell) EmptyLun 6 Jan - 23:19


T’as le cœur qui bat. Fort. Là. Au fond de ta poitrine.  Un petit cœur esseulé qui pleure un peu en regardant les autres. Tu te sens seul. Si seul. Et différent surtout. Différent de ceux qui s’amusent face à toi. Qui rient comme des gens heureux sans te voir. Mais qui verrais ce petit garçon recroquevillé dans un coin avec sa Bible à la main. Trop bizarre. Trop anormal. Personne ne fait attention. Tu es comme le vent. Invisible et fuyant.
 
Le cœur lourd, tu ouvres ta Bible. Pour y lire quelques mots. Pour te dire qu’au moins,  Il sera toujours là. Mais ça ne fait rien. Rien du tout. La solitude est toujours là. Mordillant ton âme sans répit ou regret. Tu fermes les yeux un instant. Tu te laisses bercer par le bruit ambiant. Et alors, tu penses à lui. A ce garçon. Celui qui a arrêté le feu que tu avais provoqué sous le coup de la panique. Il a quelque chose. Quelque chose qui t’intrigue. Il a cette lueur dans le regard. Un peu étrange. Etrange et attirante. Tu aurais aimé lui parler. Mais il y a cette barrière. Cette éternelle barrière qui existe entre toi et le monde. Qui t’empêche de te mêler à eux. D’être comme eux.
 
Ton regard parcourt l’établissement à sa recherche. Tu ne sais pas vraiment pourquoi tu as ce besoin un peu étrange de lui parler. De te lier à lui. Pour le remercier peut être. Parce qu’il faut toujours remercier une personne après avoir reçu son aide. Ouais, c’est surement ça. Tu veux le remercier. Comme le bon petit Chrétien que tu es. Tu parles … Le bon petit Chrétien qui brule les gens par la pensée …  Tu te demandes aujourd’hui jusqu’où ta mère te mentait. Dieu existe t-il vraiment ? En tout cas, la Bible est bien là. Ta mère ne l’a pas inventé. Cela doit vouloir dire qu’il existe non ?
 
Après de longues minutes de recherches, tu finis par te planter devant sa porte pour l’attendre sagement. Cette fois ci, ça sera la bonne. Tu lui parleras. C’est sur. Ou ce sera comme d’habitude. Tu le regarderas de loin, trop effrayé pour oser lui adresser la parole. Tu ne sais pas bien combien de temps tu restes planté là comme un idiot.  Mais il finit par arriver. Alors tu te redresses. Brusquement. Un peu trop brusquement. Ca te donne la tête qui tourne. « bonsoir » Y’a ton cœur qui fait un petit bond. Tu souris un peu ressentant une étrange satisfaction à son simple bonsoir. Alors, tout doucement, tu murmures toi aussi « … ‘soir ». Tu te sens courageux ce soir. Alors quand il rentre, tu le suis timidement. Ton regard s’écarquille lorsqu’il se pose sur la chambre. Dérangée. Totalement dérangée. Tu ne peux pas t’empêcher de penser à ce que ta mère te ferait subir pour une chambre dans cet état. Mais tu ne dis rien. Tu te contentes d’observer. Comme toujours. Tu te tortilles un peu, mal à l’aise. T’es là, comme un petit gamin perdu. Y’a rien qui ne sort de ta bouche. Pas un mot. Alors lorsqu’il te fait signe qu’il va dans la salle de bain, c’est presque un soulagement.
 
Tu te détestes. De ne pas savoir parler aux gens. De ne pas être normal. Mais t’as jamais appris ça toi, la normalité. Tu sais pas faire. Comprendre les gens. Tout ça. Ca a l’air tellement facile pour les autres. Pourtant, toi t’es là, à paniquer totalement parce que, bientôt, il sortira. Il faudra lui parler. Etre comme tout le monde. Dans ton petit cœur, le sang afflue vite. Tu le sens presque. Tu tournes en rond, paniquant un peu plus à chaque pas. Et là, ça revient. Là, comme ça. Brusquement, y’a des flammes devant toi. Qui brillent. Qui brulent. Y’a les flammes qui crament son matelas à une vitesse étonnante. Et tu paniques un peu plus. Comme si tu avais besoin de ça tient. « Putain, mais t'as fait quoi ?! » Tu te tournes brusquement, les yeux écarquillés. Immobile, tu ne réagis pas. T’es là, comme un con, à trembler comme une feuille sous le coup de la peur.
 
Tout est flou autours de toi. T’entends du bruit. De l’agitation aussi. T’entends ses mots, un peu lointain. Mais t’es bien infoutu de les comprendre. Tu restes là. Juste comme ça. A trembler. Tu restes au milieu de ce champ de ruine sans rien dire. Sans rien faire.
 
 
Ce n’est que de longues minutes plus tard que tu finis par te réveiller de ta torpeur. Devant toi, y’a le garçon qui te secoue. Ton regard se pose sur lui. Puis sur sa chambre. Tu clignes des yeux plusieurs fois. La scène est désastreuse. « … Je … » Tu ne sais pas quoi dire. Pas du tout. « J’ai… P…Pardon… J’ai… J’ai pas fais… exprès… ». Tu sens les larmes te monter un peu aux yeux. Tu mérites une punition exemplaire pour ce que tu viens de faire. Dieu ne te pardonnera pas sinon. Il te faudra endurer maintes douleurs pour être digne de son pardon. Tu en es bien conscient. Alors doucement, baissant les yeux, tu détaches ta ceinture avant de la tendre au garçon. Tu ne lèves pas les yeux une seule fois, tu ne le mérites pas. D’une petite voix, tu demandes, hésitant « … v…vous préférez a…avec ou sans vêtements… ? » Normalement, la question ne se poserait pas, mais ce n’est pas ta mère aujourd’hui. Et ce garçon est un inconnu. Il vaut mieux poser la question plutôt que de s’exécuter directement. C’est plus sur.
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U. Charles Lester
U. Charles Lester
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MessageSujet: Re: T'enflamme pas, je veux dormir. (nell)   T'enflamme pas, je veux dormir. (nell) EmptyDim 12 Jan - 20:58

Ma partie de chambre était en train de cramer, et tout ce que j'étais capable de faire, c'était de regarder le carnage sans être capable d'utiliser ma capacité pour m'aider. J'étais totalement inutile. Je ne servais à rien dans ce bas monde : il m'était encore possible d'agir si je n'étais pas affecté par les événements, mais dès lors que cela me touchait, je baissais les bras, parce que je n'arrivais à rien. J'étais si lamentable. Même ma colère face au pyromane ne valait pas du tout l'intensité du feu qui consumait mes affaires. Elles n'étaient rien, je pouvais les remplacer, mais... je sentais comme un vide à l'idée qu'elles allaient disparaître, parties en fumée - littéralement. Pourquoi devenais-je sentimental ? Cela m'échappait mais, cela avait certainement avec la présence du garçon, que je n'arrivais pas à oublier. Il avait beau être discret et menu, il m'évoquait plus un poids mort dans mon espace qu'un fantôme transparent. Il était bien là, tangible, réel, et il avait mis le feu à mes affaires. Et, alors que je lui hurlai d'aller chercher l'extincteur, il ne bougeait pas. Non, il ne parvenait pas vraiment comprendre ce qui se passait, comme s'il était déconnecté de la réalité. Je faillis hurler encore plus en pensant qu'il n'en avait rien à faire. Curieusement, cela me fit affreusement mal au cœur - et pas juste parce que j'en avais assez de ne pas compter aux yeux des autres et que l'indifférence était devenue une vraie souffrance. Juste parce que j'avais pensé... enfin, peu importe. Le garçon se mit alors à cligner des yeux, comme s'il était tout à coup conscient de ce qui se passait. Ce n'était décidément pas un type normal, celui-là, pour rester là, hypnotisé par le fait. Il commença à bredouiller des excuses, les larmes aux yeux, et je sentis ma colère baisser légèrement. Au moins, il ne l'avait pas fait exprès. Je trouvais que je contrôlais mal mon pouvoir, mais sur ce point, j'avais trouvé mon maître, il était pire que moi. Je ne répondis pas, attendant de voir s'il avait entendu mon ordre et s'il allait chercher ou pas ce fichu extincteur... parce que, mine de rien, ma chambre brûlait encore. J'allais le baffer, ce gosse, c'était décidé. Il m'énervait, ce n'était peut-être pas de sa faute s'il était coincé, mais quand même, il pouvait se sentir un peu plus concerné ; après tout, c'était lui qui avait provoqué ce massacre. Les flammes n'allaient pas s'éteindre toutes seules... Mais, au lieu de le voir s'exécuter, j'assistais à un curieux spectacle. Pourquoi enlevait-il sa ceinture ? C'était absurde. Il me la tendit, et je restai interdit. J'avais à peine à croire à ce que je voyais. Il... il était sérieux ? Il s'attendait à ce que je prenne la ceinture et à ce que... ? A ce que moi, je... ? J'espérais me tromper, je devais avoir les idées tordues. Ce ne serait pas rassurant, car il me faudrait me demander si je n'avais pas quelques relents de... non, c'était vraiment trop horrible. Mais en même temps, il voulait faire quoi d'autre ? Il n'allait pas me l'offrir en cadeau pour se faire pardonner... et ce n'était pas avec une ceinture ridicule que j'allais éteindre les flammes... Non, Chaz, tu ferais mieux d'aller chercher cet extincteur et de faire comme si cet incident ne s'était pas produit, soufflait une petite voix dans ma tête. Je n'allais que m'attirer des ennuis, et le garçon... Mais non, je ne pouvais pas non plus me contenter de l'ignorer ! Ce type était taré... et moi, j'allais devenir timbré à ce rythme. Bon, tant pis pour ma chambre, pour l'instant, les flammes n'avaient toujours pas atteint les lits de mes deux imbéciles de condisciples, absents pour la soirée, donc je pouvais me permettre de dire à mon pyromane ce que je pensais. Avec ou sans vêtements, non mais vraiment, il me prenait pour qui ? « C'est pas la peine de fantasmer, mec, t'es pas mon genre alors tes vêtements, tu les gardes. » Comment, je réalisais mal ? Bon, j'avoue, ce n'était pas forcément la meilleure réaction à avoir, mais je me voyais mal réagir autrement. Surtout que lui ne semblait pas vraiment réagir, comme s'il ne comprenait pas que j'étais en train de lui dire que je n'allais pas le frapper... Mes sourcils se haussèrent quand je compris à quel point il était sérieux. Même avec ma réplique, il pensait sans doute très sérieusement que j'allais prendre cette ceinture. Je devais me calmer. Je soufflais un bon coup, essayant de me rappeler comment on devait se comporter face à un enfant qui ne comprend pas encore le second degré... je précise que je n'ai absolument aucune expérience de ce type et que je m'attendais à un échec cuisant. J'essayai de m'adoucir. « Écoute... je ne prétendrai pas que je ne t'en veux pas. Je t'en veux un peu. Mais tu n'as pas besoin d'être... puni pour cela, tu comprends ? C'était un accident, je le sais. Alors reprend ta ceinture. Je ne te ferai jamais de mal. » Même moi, j'étais étonné par ma dernière phrase, une promesse totalement ridicule que je savais très bien que je ne pourrai jamais tenir. Bien sûr que j'allais lui faire du mal, c'était inévitable. Je faisais du mal à tout le monde, peut-être pas physiquement, mais avec mes mots. C'était même ma spécialité. Ce n'était pas du sang qui coulait dans mes veines, c'était du venin, du fiel. J'étais presque le mal incarné, au fond, et si je n'avais pas envie de blesser son corps, je savais pertinemment que j'allais tôt ou tard atteindre son âme. C'était inévitable. Et, vu l'état dans lequel il était, les dommages seraient peut-être irréparables. Je ferais sans doute mieux de le laisser tranquille, de me tenir loin de lui - même si c'était lui qui s'approchait de moi. « Si tu ne veux pas m'aider, ce n'est pas grave. Je vais essayer d'arrêter ce feu. » Et je le plantai là, allant chercher l'extincteur dans le couloir. Je revins et fit un sort aux flammes, qui ne s'étaient heureusement pas trop propagées. Quel désastre. Je n'avais plus aucun où dormir. Abattu, je me laissai tomber et m'assis dans les cendres. Pour une fois, j'avais envie de pleurer. Cependant, je n'osais pas. Il était toujours là.
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