Je n'ai pas beaucoup d'amis. Être ami avec quelqu'un signifie pour moi de le condamner à une vie bien plus courte que la normale. Je m'en fais peu pour les quitter plus facilement. Je ne connais que deux personnes sur Terre avec lesquelles je peux rester éternellement amie : Sammi et Tavi. Régénération cellulaire et immortalité, elles ne risquaient rien. C'était deux amitiés très différentes. L'une plutôt classique et l'autre extrêmement ambiguë. Tavi était certainement une des rares personnes avec qui j'aurais pu avoir une relation longue mais ce n'était aucunement ce que nous recherchions. Bien qu'elle est immortelle, j'ai la prétention de penser que nous sommes trop jeunes pour désirer ce genre de relations. Je l'aimais comme amie et j'aimais l'avoir dans mon lit. J'étais incapable de définir mes sentiments à son égard. Je voulais simplement vivre cette relation comme on l'entendait, sans jugement. Vivre en tant qu'amies et dormir en amantes. Je venais la retrouver dans sa chambre avec une bouteille de rhum. Nous nous étions donné ce rendez-vous comme quasiment toutes les semaines. Je frappe à sa porte discrètement. Il est 21h passé et nous avions toute la soirée devant nous. J'attendais sagement qu'elle m'ouvre la porte. Puis je la vois enfin, plus ravissante que j'avais. Je la prend sans un mot dans mes bras délicatement en signe d'amitié et de salut. J'entre dans sa chambre comme si c'était la mienne. « J'ai amené de quoi rendre la soirée plus amusante. », sourire aux lèvres, je lui montre la bouteille encore bien pleine.

Elle fixe le bout de son annulaire en soupirant. La pointe du compas ne laisse qu'un minuscule petit point rouge. Ça ne pique même pas. Sans trop savoir si c'est parce que ce geste est devenu une habitude, ou parce que rien ne peut l'atteindre véritablement. Elle enfouie sa tête entre ses bras, le front sur la table. Les cours l'ennuient, qu'est-ce qu'elle peut bien apprendre à faire de plus quand on ne peut déjà pas la toucher ? Les heures s'étirent, la journée s'allonge. À chaque nouvelle minute, c'est une minute de trop. En rentrant des cours, Tavi s'affale sur son lit, les yeux rivés vers la fenêtre. En forçant un peu, elle peut presque voir le mouvement des nuages. Ils la traiteront de rêveuse, de lunatique. C'est souvent vrai, mais pas aujourd'hui. Aujourd'hui elle attend, parce que la journée n'est pas finie.
Un léger battement à la porte la tire de sa torpeur et lui redonne un sourire. Trop large sourire. Elle se précipite pour ouvrir. C'est Anastasia armée d'une bouteille pleine, attendue un peu comme le messie. En général, Tavi refusait d'avouer que sa présence lui redonnait le sourire. Elle ferme le yeux à son étreinte, basculant légèrement sa tête contre la sienne. Son contact est électrisant, vibrant. Parfois, Tavi s'amuse à accuser son don. La radioactivité, le frisson du danger qu'elle ne peut ressentir qu'en sa présence. Inutile de chercher l'explication plus loin, n'est-ce pas ? Se poser des questions n'a jamais été son fort. Son regard glisse vers la boureille. « Han, merci, merci!, babille-t-elle, tu viens sauver la journée la plus barbante de l'année. » Tavi tournoi sur elle-même un instant avant de s'envoler vers un placard croulant sous les livres et les papiers. L'ouvrir est un véritable défi, mais Tavi parvient tout de même à attraper deux verres qu'elle jette sur son lit. « Allez amène toi poupée! » Sa main dans la sienne, juste une légère pression pour l'entraîner sur le lit. « Tu m'as manquée, parle moi » Sa main se desserre une seconde trop tard. Ses yeux un peu partout sur son visage. Un sourire qui ne demande qu'à éclore du bout des lèvres. Encore une fois, elle attend la suite.

Je pénètre dans cette chambre que je connaissais trop bien par cœur. J'ai toujours cette sensation que ce qui est à moi est à elle et inversement. Ses paroles me font sourire et sans un mot, je me laisse guider par sa main sur la mienne. Assise sur son lit, j'ai l'impression que son regard me déshabille. Je soupire un coup et ouvre la bouteille pour remplir les deux verres bien trop vides. Elle veut me faire parler alors qu'elle sait très bien que ce n'est pas vraiment mon truc. Je fais quand même de plus en plus d'effort pour m'obliger à sortir plus souvent des sons d'entre mes lèvres. Elle aussi m'avait manqué, plus que tout. Je pose la bouteille au sol et chacune un verre à la main, nous trinquons à rien. Mon regard croise le sien et il veut tout dire. Je sais très bien qu'elle peut lire en moi, qu'elle devine que son sentiment et le mien également. « Pas grand chose. La routine devient ennuie. Je crois que je ne progresse plus. ». J'étais dans l'institut depuis plus d'un mois et il ne m'en restait plus que deux pour parvenir à contrôler mes ondes, autrement je quitterais les lieux comme à mon habitude. J'amène le verre à mes lèvres pour en boire quelques gorgées. « Et toi, t'as tenté de nouvelles expériences ? ». Je savais que Tavi aimait se tester, tout comme les personnes ayant une capacité similaire à la sienne. J'étais toujours au premier rang des nouveaux exploits de Sammi mais je n'arrivais pas à regarder Tavi se faire du mal. Son pouvoir me paraît plus aléatoire, j'ai l'impression qu'il pourrait la quitter d'un jour à l'autre. Ma main caresse le côté de sa cuisse. C'est l'une des seules personnes qui arrivent à me détendre avec un simple contact physique. Inexplicable.

Le verre du bout des doigts. Tavi fixe un moment le liquide brun, comme si elle attendait de lui quelque chose. Elle a ce regard, ce regard toujours plein d'attentes. Comme si le verre devait lui rendre servir. Tout a son utilité. Le rhum lui pique à peine le bout de la langue. « Dis pas ça, je suis sûre que tu t'en sors très bien. C'est toi la meilleure après tout. » Elle penche un peu la tête vers le mur. La petite moue triste d'Ana lui donne envie de caresser sa joue pour la réconforter. Pourtant Tavi déteste ça en temps normal. Écouter les gens, trouver les mots, adapter ses gestes, mais avec elle, elle n'a pas besoin de se forcer. Son corps s'oriente en fonction des positions qu'elle prend, ses paroles restent maladroites mais elle ne peine pas à ouvrir la bouche pour trouver une réponse. La plupart du temps Tavi ne le remarque pas, quand c'est le cas, elle fronce les sourcils et dévie de sa trajectoire, contrariée qu'une personne puisse avoir autant d'influence sur son comportement par sa simple présence. Anastasia était censée n'être qu'un moyen d'expérimenter, la clé pour ressentir à nouveau frissons et peurs. « Mmh non rien.. » se contente-t-elle de répondre d'un air vague. Tavi ne supporte pas trop de parler de ces choses là. La plupart du temps, elle s'exerce seule ou avec un mutant à la capacité offensive. Inutile de se transformer en bête de foire. Une fois encore, elle esquive le sujet. « Moi aussi je suis un cas désespéré. » Elle hausse les épaules.
Un sourire se dessine sur son visage sans qu'elle ne s'en aperçoive. Il lui faut quelques secondes pour réaliser que c'est son amie qui effleure le tissu de son pantalon. Cette sensation comme une habitude. L'impression de connaître ses gestes par cœur. Tavi glisse un peu sur le lit, jusqu'à pouvoir poser sa tête sur les jambes de son amie. Ses cheveux s'éparpillent un peu partout autour d'elle, une mèche reste accrochée à ses cils. « Je suis crevée. Tu veux bien allonger ton bras pour allumer la musique ? » Elle ferme les yeux un moment, impatiente que la musique se propagent dans ses gestes. Sa tête tournoie avant même de l'entendre.

Spoiler:

Mon regard se pose sur ses lèvres qui s'agitent pour me répondre. Ses lèvres sulfureuses que je connaissais déjà bien mais jamais assez selon moi. Elle s'allonge tendrement sur le lit et pose son visage contre mes cuisses. Je regarde ses cheveux s'étaler sur mon jean et commence à jouer avec. Je fais passer ses mèches entre mes doigts, je les replace correctement et les lui caresse. J'ai rarement éprouvé autant de tendresse envers quelqu'un. Sur ses paroles j'appuie sur le bouton "On" de la chaîne encore à mon accès en tendant le bras. Berlin de RY X commence sa douce mélodie. Inconsciemment, mes doigts commencent à pianoter la mélodie le long de l'épaule de Tavi. Musique poétique qui berce les maux. Ma tête se bascule en arrière quelques instants, je ferme les yeux et me laisse entraîner par cette mélodie. Cette musique courte, s'arrête. Je me redresse et j'ai toujours mes doigts enfoncés soigneusement dans la chevelure de Tavi. Je la regarde se reposer, elle semble apaisée. Je pose mon verre par terre délicatement à un endroit stratégique pour ne pas le renverser. Je regarde le reste de la chambre en pensant que je n'avais certainement jamais rencontré les colocataires de Tavi, j'ignorais qui faisais partie de sa vie quotidienne et cette pensée éveilla un côté de ma personnalité que je ne me connais pas : la jalousie. Je continuai à regarder Tavi et plus je la voyais, plus j'avais envie d'elle. C'était inexplicable cette attirance physique, ce besoin de la sentir contre et avec moi. Au fil de nos rencontres, nous développions davantage le côté physique que le côté amitié de notre relation. Je cherchai son regard sans un mot. J'essayais de lire en elle, savoir si elle éprouvais la même chose que moi à ce moment-là où si elle était à un moment de sa vie où elle a besoin d'une simple amie. « Tu veux que je te laisse te reposer ? ».

La musique est beaucoup plus douce que ce qu'elle attendait, il suffit des quelques secondes pour que tous ses muscles se relâchent. Apaisée. Elle laisse un moment les doigts délicats de son amie jouer avec ses cheveux. L'impression que cet instant est fragile, tellement qu'elle ferait tout pour le protéger. Un mouvement brusque, une fausse note dans la chanson, un mauvais nuage devant la fenêtre et tout s'écroulerait comme un château de carte. De plus en plus, Tavi a l'impression de marcher sur un fil: de part et d'autre, le vide, la douleur, mais on se concentrant sur le fil, elle peut atteindre la perfection du moment, la plénitude. Quelque chose qui ressemble tellement à de la joie qu'elle est tentée de ne pas chercher plus loin. Sa main est toujours sur le verre mais elle ne le tient presque plus. Doucement, elle tend le bras en dehors du lit pour le poser. Ne pas bousculer le moment. Garder l'équilibre sur le fil. Elle laisse échapper un petit soupir, la main d'Anastasia reste dans ses cheveux. Ce geste qui l'aurait fait fuir chez n'importe qui d'autre, et là, elle en réclame encore.
La voix de son amie interrompt la musique, Tavi n'a pas ouvert les yeux depuis tout à l'heure, entre sommeil et épanouissement. « Non t'en vas pas! Anya, reste avec moi. » Les yeux s'ouvrent rapidement, elle se redresse avec un peu de difficulté, sonnée d'être tombée de son fil. Ses yeux scrutent ceux d'Anastasia pendant un moment. Elle s'imagine difficilement jusqu'où elle peut lire en elle, elle se pose mille et une question alors que les réponses sont juste sous ses yeux. Elle y voit l'envie mêlée à l'interrogation, cette sorte d’appréhension à chaque hésitation, c'est comme son propre reflet. « S'il te plaît, reste avec moi. » Sa voix se fait un peu plus douce, presque un murmure. Elle niche sa tête dans son cou, respire doucement l'odeur de sa peau jusqu'à se calmer, remonter sur le fil en parfaite équilibriste. Bientôt, ce n'est plus seulement le calme qui la gagne mais une foule d'autres émotions qu'elle contrôle assez mal. Sa tête se déplace à peine, bientôt ce sont ses lèvres qui remplacent sa joue au contact de la peau d'Anastasia. Ses baisers sont presque imperceptible. Elle pose une de ses cheveux sur ses cuisses, une de ses mains sur le bas de son ventre caressant le tissu du bout des doigts également. Tavi a l'impression qu'elle pourrait la briser en un instant, elle n'est jamais si délicate qu'en sa présence, sa maladresse rangée pour un moment, ses émotions triées pour un moment... jusqu'à ce qu'elle ne maîtrise plus rien, et que tout explose.

Mes paroles semblent résonner dans la pièce. J'ai la sensation que je n'aurais jamais du les dire. Je la sors de son demi-sommeil en un instant. Elle ne paraît plus apaisée et c'est de ma faute. Elle me demande de rester. Demande qui m'arrache un fin sourire du coin de mes lèvres. Je ne lui répond pas, je me contente de rester. Je la laisse me reprendre dans ses bras. Une de ses joue se pose au creux de mon cou, ce qui a le don de me donner des frissons. Peau contre peau, je ne m'en lasserais jamais. Elle faisait parti des deux seules personnes au monde que je n'avais pas l'impression de briser en restant à leur côté. Je ferme les yeux, me laissant aller à ce contact des plus agréable. Je divague légèrement. Elle prend de plus en plus d'espace sur mon corps. Je sens ses lèvres qui m'ont tant manqué se déposer avec tendresse contre mon cou. Je soupire légèrement alors que ses mains prennent peu à peu leur marque sur moi. Mes mains se posent contre son dos, comme pour la rapprocher davantage contre moi. J'ai la sensation de perdre peu à peu pied. De n'être plus vraiment moi mais le reflet qu'elle a de moi. Je lui appartient et une part de moi déteste avoir cette sensation. Je voudrais pouvoir lui résister mais cela me paraît impossible. Je caresse tendrement son dos. Une de mes mains remonte le long de sa nuque et s'empare délicatement d'une poignet de ses cheveux. Je décolle son visage de mon cou pour la regarder quelques instants avant de venir l'embrasser. Mes mains emprisonnent son visage quelques instants avant de perdre peu à peu le contrôle. Je les pose sur ses cuisses, je les caresse avant de les griffer légèrement à travers le tissu de son bas. Je l'aide à s'asseoir à califourchon sur moi, mon visage est légèrement relevé pour pouvoir l'embrasser. Tout semble s’accélérer autour de nous. Je ne prête plus attention à ce qui nous entoure. Je ne veux même pas savoir si ses colocataires ont prévus de rentrer durant la soirée, je voulais simplement pouvoir profiter d'elle, de sa présence et de son corps tant que cela m'était encore possible. Un fin sourire se dessine sur mes lèvres cachées par les siennes. Mes mains remontent le long de ses cuisses pour saisir son haut par le bas. Je le lui retire en douceur pour qu'elle se retrouve plus vulnérable, j'ai ainsi l'impression de reprendre le contrôle sur la situation mais tout ceci n'est qu'illusion, elle me ferait bien vite recomprendre que face à elle, je ne pouvais rien prévoir.

Son baiser a un goût si familier que Tavi oublie aussitôt sa frayeur. Elle est bien là, elle peut sentir son corps contre le sien, ses mains sur sa peau. L'impression d'être à la maison, pourtant, à chaque geste, à chaque souffle, c'est comme si Anastasia l'entraînait ailleurs, toujours plus loin. Comme si leur trajectoire changeait à chaque baiser. C'était inexplicable, impossible à comprendre, inutile de l'analyser. Il suffit de lui rendre son baiser avec passion, d'enserrer un peu ses jambes autour des siennes. Installée sur ses cuisses, elle est un peu plus grande qu'Anya qui semble encore un peu plus fragile. Tellement fragile qu'elle soupçonne peut-être même pas la force, l'emprise qu'elle a sur son amie. Celle-ci est presque incapable de respirer alors que son t-shirt glisse le long de ses bras. Ça ne dure qu'un instant, mais lui semble l'infini. La douleur est presque physique, elle fronce les sourcils.  Libérée de son vêtement, elle peut replonger sur son corps. L'esprit toujours un peu plus engourdi, incapable de penser à la moindre chose, à part à son désir, à ce corps qui s'offre à elle. Anastasia est bien une des rares personnes avec qui Tavi arrive encore à ressentir cette passion, cette envie toujours mêlée d'une pointe d'appréhension, d'une pointe d'adrénaline. De ses baisers, lle la plaque un peu plus fort contre le mur avant de l'entourer de ses bras et de l'allonger sur son lit. Ce lit minuscule, bien trop petit pour deux personnes, souvent désagréable mais avec Ana il lui semble toujours trop grand, tant que leur corps ne sont pas fondus, mêlés, elle aura toujours trop d'espace pour elle. Les mains de Tavi lui enlèvent son haut avec à peine plus de force qu'elle ne l'aurait voulu. La peur de ce désir se mêle à l’allégresse de redécouvrir nu sous ses yeux. Toujours au-dessus d'elle, Tavi l'observe un moment, la dévore du regard, lui adresse un sourire presque malgré elle. C'est son corps qui décide. Doucement, elle s'approche à nouveau. Un baiser sur les lèvres, elle effleure son cou, sa poitrine, avant de s'approcher de son ventre. Les mains un peu tremblantes elle commence à déboutonner son pantalon.